Doubler son profit sans publicité.

Christophe Pian
The Colony
Published in
4 min readNov 20, 2018

Jeudi soir, un homme d’affaires se trouve au bar de son hôtel. Une très belle femme s’approche et demande si elle peut se joindre à lui pour un verre. Quelques heures et quelques verres plus tard elle lui propose de monter dans sa chambre, l’homme accepte. Bien plus tard il se réveille dans une baignoire remplie de glaçons, blackout complet et une douleur lancinante au ventre. Un message est posé sur le bord de la baignoire: ne bougez pas sous peine d’ouvrir les points de suture, on vous a prélevé un rein, une ambulance est en chemin.

Le pouvoir des histoires n’est plus à démontrer: mémorables, émotionnelles, concrètes, convaincantes voire crédibles, on les mémorise mieux, pour plus longtemps, et on a tendance à les partager avec d’autres, j’en veux pour preuve que chacun de vous connaît sûrement une variante de cette légende urbaine.

Pas étonnant donc que le bouche à oreille soit un moyen si efficace de faire parler de soi. En plus des avantages mentionnés, il est gratuit, rapide, et les réseaux sociaux lui donnent une portée sans précédent. Les statistiques de la Harvard Business Review nous informent qu’une entreprise peut doubler son profit grâce à la portée exponentielle du bouche à oreille. En plus des avantages liés au storytelling évoqués plus haut, c’est une méthode de communication particulièrement efficace: la crédibilité supplémentaire que l’on accorde à ses amis plutôt qu’à une personne lambda ainsi que la “preuve sociale” (si quelqu’un à qui je m’identifie fait comme ça, alors c’est sans doute bien pour moi aussi) sont des mécanismes psychologiques bien ancrés chez chacun d’entre nous.

Il y a néanmoins une règle d’or: on ne parle aux autres que de ce qui est exceptionnel. Ce qui est de l’ordre du “normal”, qui est intégré comme faisant partie du quotidien n’est pas digne d’être partagé: Une salle de bain privative? De l’eau chaude en moins de 2 secondes dans votre chambre d’hôtel au 45ième étage d’un immeuble? Et alors?! Les investissements consentis pour y parvenir sont pourtant loin d’être anodins, seulement c’est implicite pour la plupart d’entre nous, et ne fera pas l’objet de la moindre attention et donc de mention.

Rendre son produit/service digne de mention n’est pas simple, mais loin d’être impossible. Certes les leaders du digital ont significativement contribué à rendre la tâche plus ardue: aux attentes qui preéxistaient voici quelques nouvelles attentes qui sont devenues “standard” pour la plupart d’entre nous:

  • Immédiateté: tout est à porté de clic, la gratification est instantanée: je poste une photo, je reçois un like, je clique sur cette chanson ou ce film, il se lance.
  • Ubiquité: que je sois à la ville ou à la campagne j’ai accès à l’information grâce à une connexion internet quasiment ininterrompue: cet été je recevais en direct les photos et vidéos de mon cousin en trek au Kyrghystan, à plus de 6000 mètres d’altitude…
  • Personnalisation: différents services m’envoient hebdomadairement des listes de suggestions personnalisées, qu’il s’agisse de musique, de vêtements, de magazines, d’articles, etc.
  • Consistance: que je consulte mes réseaux sociaux ou mon mail depuis mon téléphone, ma tablette ou mon ordinateur personnel ou celui d’un ami j’ai systématiquement accès aux mêmes fonctionnalités et aux mêmes informations.

Digitaliser vos opération ne va donc pas contribuer à créer une expérience exceptionnelle, simplement à “moins frustrer” vos clients actuels. Cette étape est néanmoins cruciale car un client frustré va également partager cette expérience avec un nombre important de personnes (souvent plus que dans le cas d’une expérience positive d’ailleurs).

Il est donc nécessaire de comprendre où et quand il est opportun d’investir ses efforts pour offrir une expérience qui soit extraordinaire et ainsi augmenter les chances qu’elle soit partagée à d’autres par bouche à oreille.

Rendre une expérience extraordinaire débute en cartographiant l’ensemble des “touchpoints” ou “points de contact” de votre entreprise avec lesquels vos clients interagissent:

Lorsque la compréhension de cette expérience devient claire, il faut générer des idées permettant d’améliorer le status quo par une expérience plus désirable et matérialiser celles-ci par du prototypage. Finalement on fait tester par de véritables clients. L’ensemble de ce processus est également connu sous le terme d’“innovation”.

Contrairement à certaines idées reçues l’innovation n’est pas le fait d’inventer de nouvelles choses mais au contraire de créer des associations de produits/services; c’est la conjonction de deux concepts qui vont permettre d’améliorer une expérience existante. Voici quelques exemples choisis pour illustrer le propos:

Uber = smartphones + chauffeurs.

Nike fuel band = bracelet + bluetooth.

Genius bar = Apple Store + rendez-vous.

Ces exemples sont sans conteste des cas d’école d’innovation, pourtant rien n’a été inventé. Malgré cela, chacune de ces améliorations du status quo permettent de faire passer le seuil de “normalité” aux utilisateurs et de générer des expériences dignes d’être partagées:

Dès lors, si vous souhaitez faire grandir votre chiffre d’affaires, vous semble-t-il plus judicieux de dépenser des sommes importantes pour promouvoir un service/produit standard ou d’innover pour que vos clients deviennent vos premiers avocats? A vous de voir…

--

--

Christophe Pian
The Colony

Senior UX Designer @ Pictet Group | User centric innovation leader, former entrepreneur and start up coach