Prototypage: les 5 dimensions à considérer

Christophe Pian
The Colony
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4 min readJan 30, 2019

Les pratiques de lean management, elles-même inspirées du Design Thinking commencent leeeeeeeeeentement à faire des émules auprès des entreprises et plus particulièrement des start-ups. Une des conséquences directes est notamment l’émergence de workshops et d’activités de prototypage dans le but de développer une solution progressivement, de manière itérative et ainsi en réduire le risque d’échec lors de sa commercialisation.

Quand on parle de prototype on se réfère à une version tangible d’un produit ou service (donc au minimum représentée visuellement). Bien que tangible il n’est pas un produit fini, bien au contraire. Il est particulièrement utile de prototyper lorsque l’on veut répondre à des questions spécifiques sur un potentiel futur produit en observant l’interaction entre un utilisateur et celui-ci. Pour plus d’informations au sujet de la philosophie des prototypes c’est par ici.

La littérature recense 5 dimensions de fidélité dont il faut tenir compte quand on crée un prototype. En fonction du stade d’avancement d’un projet il est plus ou moins pertinent de pousser l’effort dans ces différentes dimensions. A noter qu’un niveau de fidélité important testé trop tôt peut également se révéler intimidant ou faire hésiter les utilisateurs à donner un feedback sincère, de peur d’offusquer ceux qui font tester la solution. Il est donc important de savoir doser l’effort. Voici ces 5 dimensions sans aucun ordre de priorité particulier.

  1. Fidélité visuelle:

Il s’agit de la partie émergeante de l’iceberg: ce que l’on voit. Différentes questions peuvent se poser à son sujet: est-ce que je me contente de croquis approximatifs ou est-ce que j’applique la charte graphique de l’entreprise en utilisant les bonnes typographies, les bonnes palettes de couleurs, etc? Cette dimension est plus ou moins importante lorsque l’on souhaite observer la réaction d’utilisateurs à des “call to action” (boutons) ou quand ils doivent interagir avec données visuelles complexes…

Différents niveaux de fidélité pour la même application mobile

2. Scope:

La portion de la solution qui est visible grâce au prototype: est-ce que l’on veut illustrer l’ensemble d’une application ou simplement le processus d’inscription par exemple. La plupart du temps on ne va tester qu’une partie volontairement limitée. La taille limite d’un scope c’est celle qui permet d’élucider les questions que l’on se pose et d’offrir un peu de contexte à ceux qui vont tester le prototype. On peut limiter le scope de manière artificielle en fournissant des scénarios d’avance aux utilisateurs, par exemple pour un site de e-commerce: “Utilise la fonction de recherche pour trouver des haut-parleurs waterproof.”

3. Profondeur:

Elle défini le degré de fonctionnalité qui est implémenté: le code, la couche logique, les messages d’erreur.

Ici la question est essentiellement celle de savoir si le stade d’avancement justifie que l’on développe du code informatique pour tester des hypothèses et des ressources à disposition (compétences en développement). Lorsque l’on est dans une phase précoce c’est sans doute inutile même lorsque les compétences le permettent.

4. Interactions:

La saisie de données par l’utilisateur, notamment sur des interfaces classiques par biais d’un clavier, d’une souris, des doigts, de la voix ainsi que les retours donnés par l’interface: une image, du texte, un son, une impression…

Les critères dont on va tenir compte sont notamment le temps de réponse, le type de feedbacks obtenus en réponse à une saisie, etc. La fidélité de l’interaction va être plus ou moins importante en fonction de la nature du prototype que l’on teste: pour des produits digitaux ce n’est pas crucial que le prototype réagisse exactement comme le produit fini. Pour des appareils physiques tels que des robots ménagers par exemple cette dimension est plus importante.

On l’attend toujours celui-ci…

5. Contenu:

Fait référence à l’interface utilisateur et à l’aide que l’on obtient dans nos interactions, à savoir le texte, aide, informations, images. Il sera plus important d’avoir un niveau de fidélité élevé si l’utilisateur doit apprendre de nouveaux concepts ou s’il doit prendre des décisions importantes.

A noter que l’on peut être “lean” au sein d’une méthode lean et “tricher” en utilisant ce que Jared Spool appelle le “Incredibly Intelligent Help”, à savoir un modérateur qui répond d’une manière pré-définie aux questions de l’utilisateur lorsqu’il est coincé par exemple. Cela permet de se concentrer sur les fonctionnalités primaires du prototype.

Conclusion

Le but d’un prototype n’est pas de réaliser un prototype, c’est d’obtenir des réponses aux questions qu’on se pose, d’observer des comportements, des situations et d’aligner les parties prenantes de l’organisation, en éliminant les batailles d’opinions subjectifs qui surgissent dans une équipe quand les choses ne sont pas cadrées.

Pour optimiser cet apprentissage le mieux est d’explorer différentes directions à la fois et valider les acquis avant de passer à des versions de prototypes plus fidèles. Cela vaut mieux que se concentrer sur une seule idée en faisant évoluer les dimensions sur une seule itération.

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Christophe Pian
The Colony

Senior UX Designer @ Pictet Group | User centric innovation leader, former entrepreneur and start up coach