Mémorable, le grand oublié de l’UX
On dit souvent que le but de l’UX c’est de créer des produits et des services qui sont désirés, utilisables et mémorables. Des produits dont les utilisateurs ont besoin, qui sont faciles à utiliser et surtout qui leur laissera un souvenir agréable. Ça c’est la théorie mais dans la pratique, on constate souvent que ce n’est pas forcément le cas.
Sur les projets on pense toujours à l’utilisable, souvent à l’utile mais on oublie quasiment à chaque fois le mémorable.
Toujours utilisable
Faire en sorte qu’un produit soit utilisable c’est sûrement la partie la plus travaillée et même parfois la seule. Quelques années en arrière le monde du design était différent. On ne parlait pas de développement Agile ou d’UX design. Le client arrivait, expliquait ce qu’il voulait et on était partit pour quelques mois de boulot. Les designers n’étaient alors que des ergonomes et des graphistes. Tout était fait pour que l’interface soit la meilleure possible. La plus simple possible à utiliser.
En tant que designers, on prenait en compte la hiérarchisation du contenu, on retirait ce qu’on considérait comme moins utiles pour l’utilisateur, on travaillait sur la compréhension de chaque pages. On faisait des prototypes. Bref ce n’était pas si loin du travail d’aujourd’hui.
Cela ne veut pas dire que l’utilisateur n’était pas pris en considération. Loin de là, c’était souvent la première question qu’on se posait : “Pour qui est ce produit ?”. Au final, les phases de recherches et de tests étaient justes réduites. En France (dans la plupart des cas), l’héritage de cette époque est encore très présent et malgré tout ce que disent la plupart des entreprises, beaucoup travaillent de cette façon bien qu’ils mettent en place d’autres types de méthodos (Itérer ce n’est pas qu’ajouter des features, ça veut aussi dire retirer ou refaire). C’est d’ailleurs pour ça que le focus de l’UX design, sur la plupart des projets, est mis sur la réalisation des écrans (j’en parle plus en détail dans cet article)
Souvent utile
L’utilité d’un produit est un sujet délicat. Il existe deux raisons pour lesquels un client désire créer un produit :
- Pour rattraper son retard sur la concurrence
- Parce qu’il a eu une idée géniale sous la douche qui va changer le monde (ou lui faire prendre un coup d’avance sur la concurrence)
Dans ces deux cas, la question de l’utilité se pose. Dans le premier cas on a déjà une idée de l’utilité du produit car souvent il est déjà mis en place et on peut avoir des retours de terrain. Dans le second tout est à faire et par principe le client est persuadé que son idée est fantastique et qu’elle va forcément marcher. Hors c’est parfois tout le contraire. La raison est assez simple.
Ce que tu penses être l’idée du siècle est souvent un truc dont les gens n’ont rien à foutre (ou alors pas sous sa forme actuelle).
Dans le cas numéro un, les gens utilisent probablement déjà un produit de la concurrence donc à moins d’apporter une vraie valeur ajoutée, il y a de fortes chances pour qu’ils ne fassent aucun effort pour migrer vers ta solution. Dans le second cas, l’erreur est de croire que tu penses que tu connais ton utilisateur final alors que ce n’est pas nécessairement le cas. Voilà comment on se retrouve avec un produit souvent peu utile.
Je glisse un cas particulier tout de même : les produits de divertissements. Ces produits sont en règle générale d’une utilité mineure par définition. Il n’apporte rien de vital ou de transcendant sur le vie de l’utilisateur (quoi que..) mais lui font tout simplement passer du bon temps. Ce sont d’ailleurs souvent ces produits qui ont la meilleure expérience utilisateur car c’est la seule raison qui fait que les gens s’en servent.
Le cas du mémorable
Nous voilà enfin au coeur du sujet de cet article. Avoir un produit utilisable, c’est le minimum vital. Avoir un produit utile c’est mieux mais quand est-il du dernier élément : le mémorable. Sans surprise, c’est la caractéristique qui est la moins abordée sur les projets. Pourquoi ? C’est toute la question.
D’abord il faut voir un peu plus clair sur ce qu’est un produit mémorable. Par définition c’est un produit dont on va se souvenir après s’en être servi et qui donne envie d’y revenir. Quelque chose qui marque notre mémoire positivement (ou négativement) sur le long terme. L’objectif ici n’est pas de donner un cours de psychologie (ça viendra dans un autre article) je vais donc juste lister quelques caractéristiques qui rendent un produit mémorable :
- Différent des autres, nouveau
- Qui semble être magique
- Qui fait ressentir des émotions
Pour exemple, prenez la dernière applications ou le dernier film qui vous a vraiment marqué et poser vous la question de pourquoi il vous a marqué comme ça. Vous verrez que les caractéristiques sont très proches de celles énoncées au dessus.
Mais alors pourquoi on oublie le mémorable si c’est si extraordinaire ? Tout simplement à cause de la façon dont on créé des produits aujourd’hui en gestion de projet.
L’objectif de la gestion de projet est de limiter la prise de risque et d’éviter les écarts. Hors par définition une expérience mémorable est une prise de risque (qui peut être maîtrisée) et surtout qui sort des clous habituels.
Et ça c’est sans compter sur les neurosciences qui parfois jouent contre le métier. La plupart des études montrent que les utilisateurs ne font pas d’efforts et préfèrent (trouvent plus simple) des interactions qu’ils connaissent et maîtrisent. Alors pour limiter les risques les UX designers préfèrent rester dans ce que les utilisateurs connaissent (et les diverses guidelines) sans chercher à pousser un peu plus loin l’innovation.
Il y a aussi la difficulté de la mise en application. Créer un produit mémorable demande aux designers de penser à comment il va évoluer dans le temps dans l’esprit de l’utilisateur. C’est déjà difficile de créer un produit qui répond au besoin aujourd’hui alors que faire quand il faut aussi penser à comment l’utilisateur imagine s’en servir avant et comment il s’en servira dans le futur.
Pourtant rendre un produit mémorable aidera fortement à son succès. Pour l’acquisition, en attirant l’attention des utilisateurs. Pour la rétention en donnant envie à l’utilisateur de revenir en lui laissant un souvenir excellent.
L’expérience utilisateur ce n’est pas de la mécanique, c’est surtout une grosse part d’émotionnel.
Ex-CEO d’une startup, Experience Designer depuis presque 10 ans, touche-à-tout insatiable, je veux partager avec le monde ce que je peux apprendre jour après jour et pourquoi pas secouer quelques branches . En tout cas si ça tu as aimé clique un petit clap (ou plus) serait super sympa (au pire ça me fera plaisir)
