Retour sur la recharge sur les bornes Autolib et interrogations sur la délégation de service public
Voilà, les deux services proposés par Autolib ont été stoppés il y a quelques jours, le 31 juillet.
L’échec de l’autopartage
Le groupe Bolloré et la présidente du syndicat mixte Autolib (qui a été fusionné avec celui de Velib il y a quelques mois…) s’affrontent par presse ou tweets interposés sur les responsabilités de l’échec financier d’Autolib. Difficile de dire à qui revient la responsabilité sur l’échec du service d’autopartage…
N’oublions pas le service de recharge qui était de plus en plus utilisé
Je ne sais pas si nous aurons les chiffres d’utilisation d’Autolib pour 2017 et 2018 un jour, le rapport d’activité Autolib 2017 (qui était habituellement publié au moins de juin) n’a toujours pas été publié.
Néanmoins, et l’on peut remercier Madame Bruneau (GPSO, 1ère Vice-présidente membre du Bureau syndical Autolib) d’avoir mentionné ces chiffres lors de la séance du 21 juin 2018 du comité syndical d’Autolib, “le service Autolib’ compt[ait] 9023 abonnés recharge à fin mai 2018, dont 5500 abonnés recharge auto, 207 abonnés recharge 2 roues, 3316 abonnés recharge pro.
Augmentation du nombre d’abonnés recharge : +12% en 17 mois
Cela représente une augmentation de 975 abonnés recharge en 17 mois. Cela représente donc une très grosse augmentation, en rapportant à une année, cela fait 688 nouveaux abonnés. Il n’y avait pas eu une telle augmentation du nombre d’abonnés recharge depuis les années de lancement du service.
NB : le Procès-Verbal du Comité syndical Séance du 21 juin 2018 du syndicat mixte mentionne 2017 abonnés recharge 2 roues, c’est sans aucun doute une erreur. C’est plutôt 207 abonnés recharge 2 roues.
J’étais déjà revenu sur l’engouement pour la recharge sur les bornes Autolib et sur le rapport d’activité 2016 à l’occasion d’un précédent billet.
On peut imaginer que les 8,55 % d’augmentation du nombre d’abonnés recharge (en périmètre annuel) pouvait se retrouver en 2017 sur l’augmentation du nombre de recharge (sauf si les abonnés ont cru que l’augmentation du tarif de la recharge annoncée fin 2016 avait eu lieu, alors que ce n’était pas le cas, elle n’a au final été appliquée qu’en 2018).
En 2016, il y avait 2 fois et demi plus de recharges sur bornes Autolib qu’en 2015 ! En 2017, avec augmentation tarifaire pas vraiment (ou partiellement) appliquée, on peut imaginer qu’il y a une augmentation toujours importante du nombre de recharges par des véhicules tiers, en étant prudent, on peut imaginer qu’il y a eu au moins 230 000 recharges et sans doute plus (plus de 300 00 ?). Il est dommage que ce nombre n’ait pas été mentionné jusque là (sauf si je l’ai loupé dans le PV).
La situation de la recharge à Paris : très loin d’être satisfaisante
La mairie de Paris a beau dire que tout va bien à Paris sans le service de recharge sur bornes Autolib, on ne peut pas dire que les utilisateurs effectuant 250 000 recharges annuelles sur bornes Autolib vont pouvoir se recharger sur les quelques 420 points de charges disponible à Paris essentiellement des bornes Belib (les bornes Autolib c’était des milliers de bornes).
Même si on peut dire que le réseau Belib très en retard sur son déploiement commence enfin à couvrir un peu Paris mais il reste quand même plusieurs zones très étendues (comme une grande partie du 12ieme arrondissement :( …) où il n’y aucune borne de recharge. Pour ceux qui veulent comparer avec le réseau de bornes Autolib, je suis déjà revenu dessus. Et de toute façon, Belib n’est pas adapté à ceux qui n’ont pas une voiture avec de la recharge rapide (et qui ont donc une voiture rechargeable à vitesse “lente”).
On peut aussi parler de la qualité de service très insuffisante du réseau de recharge Belib : Yoann NUSSBAUMER (Chargemap) est revenu sur le sujet sur twitter :
Il me semble que la Mairie de Paris n’a fait part d’aucune réaction à ces nombreux signalements de problèmes sur le réseau de recharge Belib.
L’espoir : un retour du service recharge dans quelques mois
Mais tout n’est pas négatif, la bonne nouvelle c’est que semble-t-il conscients que “ce réseau des bornes [Autolib] sont un bien inégalé dans le monde malgré leur faible puissance : les équipes du Syndicat étudient les possibilités de mise à jour des bornes” (source : Procès-Verbal du Comité syndical Autolib Velib Métropole, Séance du 21 juin 2018).
Ceci avait déjà été expliqué par le conseiller presse d’Anne Hidalgo sur twitter : les bornes “vont devoir être mises à jour (remplacement du logiciel Bolloré par un logiciel utilisable par les villes), ce qui prendra effectivement plusieurs mois (difficile à ce stade de dire si c’est 6 mois ou moins)” (j’avais déjà cité ce point lors du billet précédent avec mes suggestions pour la reprise du réseau de recharge Autolib).
BFM TV a été un des rares à faire un article sur le sujet : Fin d’Autolib’: Paris, futur désert de la recharge électrique? :
“il ne devrait en revanche pas être possible de continuer à s’y charger pendant un certain temps. Dans ce même communiqué, la Mairie de Paris évoque en effet sa volonté de réutiliser le réseau de recharge Autolib’… mais pas avant début 2019. La date de l’arrêt d’Autolib’ reste floue: le service de recharge pour les véhicules particuliers pourrait s’arrêter dès le 2 juillet ou perdurer jusqu’à la fin du mois. Résultat: 6 mois sans ces bornes pour recharger. Les alternatives restent alors très minces. Le réseau Belib, lancé par la mairie de Paris en 2016 pour justement renforcer l’accès à une solution de recharge, présenterait en effet encore quelques points faibles. Dont le nombre de bornes : face à 1.058 stations Autolib’, Belib ne propose que 86 stations. Ces stations ne sont par ailleurs pas présentes en petite couronne.”
Bref, ce que je n’arrête pas de dire sur ce blog depuis des années :).
N’oublions pas qu’il est nécessaire de revenir à un tarif acceptable pour la recharge sur les bornee Autolib et qu’il est nécessaire de garder l’ensemble des bornes pour la recharge des véhicules électriques. J’ai déjà expliqué que Paris n’était pas doté d’un nombre si exceptionnel de bornes de recharge lors du billet précédent avec mes suggestions pour la reprise du réseau de recharge Autolib.
Il faut aussi que la Mairie de Paris agisse concrètement contre le squattage des bornes Autolib & Belib par des voitures non électriques.
La mairie Paris espérait que les nouveaux acteurs d’auto partage à Paris soient intéressés par le réseau Autolib mais il semblerait que cela ne les intéresse pas beaucoup pour l’instant. Il faut espérer que le free floating des voitures en partage ne se transforme pas en bordel monstre comme c’est le cas avec les vélos et les trottinettes.
La DSP ne prévoyait pas l’utilisation de l’infrastructure par la collectivité ?
On peut s’interroger sur l’établissement de la délégation de service public d’Autolib qui semblait ne pas prévoir la possibilité que l’infrastructure soit utilisée par les collectivités (puisque le logiciel les exploitant est la propriété de Bolloré) alors même que la DSP prévoyait que les collectivités héritaient de la propriété des bornes de recharge. Espérons au moins que des spécifications nécessaires au développement logiciel et à l’interface avec les infrastructures aient été fournies à la collectivité.
Peut être qu’il aurait été efficace de faire 2 DSP différentes : une pour la recharge et une pour l’autopartage. La DSP pour la recharge aurait pu continuer.
L’image de Paris
Désormais, quand l’on va sur le site Internet Chargemap pour trouver une borne de recharge à Paris : on peut voir des milliers de bornes “grisées” car non disponibles. Il est certain que cela ne va donner une image très positive de la ville auprès des voyageurs de passage dans la capitale. Ils vont sans doute se poser des questions.
Et pour finir, une pensée pour les employés d’Autolib dont plusieurs étaient à l’écoute sur twitter. J’espère qu’ils auront des conditions satisfaisantes pour leur avenir.
