Les histoires d’un étudiant sans histoires

Partie 7

Alma Mater
Alma Mater
4 min readJan 22, 2018

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« On sprinte, ne raccroche pas, je laisse l’appel tourner. »

Julien était allongé sur le lit de sa chambre, dans son plus simple appareil, le téléphone à l’oreille, et une couverture beige couvrant ses parties intimes.

« Putain, gros, fais vite ! » lança-t-il avec espoir en sachant qu’il n’aurait pas plus que la respiration bruyante de son ami pour réponse.

La jeune femme était partie il y a quelques temps déjà, et il savait qu’elle serait bientôt de retour, ce qui le fit immédiatement paniquer : il tenta une énième fois de forcer les menottes qui le retenait en otage contre la canalisation de sa chambre en tirant dessus, mais évidemment, en vain. Il ne s’agissait clairement pas d’une de ces paires de menottes sexy avec un bouton de secours, dans le cas où vous perdez la clé. Selon l’expertise de Julien, il était face à de vraies menottes de policier. En tout cas, elles paraissaient incassables.

Son bras gauche tendu en l’air le faisait horriblement souffrir : cela faisait des heures qu’il était ainsi. Le jeune homme aux cheveux blonds et courts entreprit de poser son téléphone à côté de lui, puis se massa l’épaule gauche maladroitement, quand il entendit soudainement la porte de son appartement s’ouvrir au bout du couloir.

Il attrapa rapidement son téléphone, le cœur battant à toute allure :

« Raph, dis-moi que c’est toi devant la porte, s’il te plait… ! »

Aucune réponse.

D’un coup, une voix s’éleva dans la pièce principale :

« Je suis rentré mon gros su-sucre d’amour ! entonna la jeune femme avec enthousiasme. Tu vas voir, on va s’amuser… »

Le jeune homme avait envie de pleurer : il connaissait d’avance son sort, il savait que cela finirait mal, il savait qu’il aurait mal…

Non, se dit-il, Raph va arriver. Putain de merde, il faut que je trouve un truc.

Alors qu’il entendait le bruit des talons de la blonde sur le parquet de son couloir, il se redressa comme il put pour faire bonne impression et gagner en assurance, puis elle apparut à ses yeux, une fois qu’elle eut traversé la porte. Julien affronta le regard de son tortionnaire souriant et il ne vit que le visage du diable : séduisante, attirante, belle, et bien plus encore… Mais lorsqu’il revoyait tout ce qu’elle avait fait sur lui, des douleurs remontaient au plus profond de son être.

« Oh ! Tu es de retour… commença-t-il en tentant de garder ses émotions de côtés. Toujours aussi… jolie.

-Je te remercie, dit-elle en souriant franchement et en s’approchant. Profites de ton temps de parole, parce qu’après tu ne pourras plus parler. Enfin, tu pourras toujours essayer, mais tu sais très bien ce qu’il va t’en coûter…»

La belle demoiselle se mit à rire, alors que Julien déglutissait non sans bruit. Il remarqua furtivement qu’elle avait changé de vêtements sous son manteau, pour ce qu’il semblait être une tenue de cuir, tout comme ses bottes : elle avait sorti le grand jeu pour lui.

L’idée de souffrir encore aux côtés de la demoiselle lui remit de nouveau l’esprit en place. Alors qu’elle commençait à mettre un genou sur le lit, il reprit la parole en bafouillant un peu, mais en restant humble :

« Juste avant de recommencer nos petites histoires, Anaïs… ajouta-t-il en voyant qu’elle ne semblait pas heureuse qu’il la coupe dans son élan. J’ai appelé un ami ! Il doit passer me déposer des cours pour demain. Ils sont… très importants ! D’ailleurs… (Il montra son téléphone, toujours en appel avec Raphaël) Ils sont en bas ! Ils vont monter, si tu pouvais aller à la porte, prendre le cours, et leur dire que je suis occupé. »

Elle l’examina rapidement de son regard froid qu’elle avait gardé toute la nuit en « s’amusant » avec lui, puis elle lui relança son même sourire radieux :

« Pas de soucis, il nous reste la fin de la journée pour te punir correctement, non ? dit-elle en se levant.

-Évidemment, répondit Julien en se forçant à rire. »

Ainsi, elle quitta la chambre en ondulant des hanches et, heureusement pour le prisonnier, cela n’avait plus d’incidence sur lui, même s’il put se rincer l’œil gratuitement en cette situation de crise. Durant le mince répit qu’il avait obtenu, il en profita pour regarder son téléphone, mais il vit que son ami avait raccroché.

Ne me lâche pas, gros, ne me lâche pas.

Seulement quelques secondes après qu’elle ait quitté la pièce, il l’entendit lui crier, depuis l’entrée:

« Mais tu ne m’avais pas dit que tu n’avais plus de crédit, Julien ?

- Je…»

Alors qu’il allait répondre, il entendit un lourd fracas à l’autre bout de l’appartement, comme si un éléphant était tombé en plein milieu de son salon, puis plus aucun signe de vie.

« Tout va bien ? demanda-t-il en haussant de la voix. Allô ? Y a quelqu’un ? »

Personne ne lui répondit, même pas Anaïs.

« C’est vous les gars ? cria-t-il encore plus fort. Allez ! Dites-moi que c’est vous ! »

Toujours aucune réponse.

Alors qu’il allait entamer une troisième interpellation, ses deux amis, Raph et Clément, rentrèrent dans la chambre en mimant le fait d’être sur un cheval, et tout deux dressèrent un gode-michet en l’air en criant en cœur :

« Les mousquetaires sont là pour vous servir ma reine ! Nous sommes venus vous sauver»

Le stress de Julien s’évapora pour être remplacé par de la honte.

Guillaume Girier

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