Parler de son expatriation après le retour

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Retour en France
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5 min readNov 13, 2016

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C’est un vaste sujet sur lequel on revient souvent : quand on revient en France, il est difficile de parler de son expatriation. Cela crée un réel sentiment d’incompréhension et de frustration. L’impression d’avoir vécu des choses fortes et hors du commun, qui devraient être passionnantes pour ceux qui n’ont pu voyager dans les pays où vous avez été et qui n’ont pas eu l’occasion de découvrir en profondeur les cultures d’une richesse insoupçonnée que vous avez côtoyé. Mais cela ne semble pas intéresser grand monde, ni vos proches, ni les nouvelles personnes que vous rencontrez au retour. “Tu commences à nous gonfler avec ton Canada”, se voit-on rétorquer, comme en témoignent des ex-expats des échos à des tentatives de partage. Pour se libérer, faire son deuil et pouvoir se reconstruire pleinement dans sa nouvelle vie, il est essentiel de pouvoir raconter son histoire, était le constat à l’origine de la plateforme de publications “Retour en France” sur Medium.

Le problème inverse se pose également. Si les ex-expats sont souvent confrontés à ce manque d’intérêt, un autre type de situation peut tout autant mener à l’embarras. Parfois, on vous en pose, des questions, mais d‘une telle façon qu’il n’est pas du tout aisé de répondre. C’est à dire que quand vous avez habité des années dans un pays, rencontré des amis comme des gens malhonnêtes, traversé des difficultés, surmonté des obstacles et aussi savouré des victoires… comment résumer tout cela en quelques mots ? Quand, lors d’un entretien d’embauche on vous dit d’un air dubitatif : “ Vous avez travaillé à Prague ? Ah… Alors, ça vous a plu la Tchécoslovaquie ?”, comment répondre de façon juste ?

Enfin, lorsqu’on vous pose à chaque fois la même (et unique) question pour la millième fois, “Mais c’est un pays à part entière ça ?”, “Tu reviens du Canada, il doit faire froid là bas en ce moment ?”(en plein mois de juillet), “ha ha, elles sont mignonnes là-bas les filles, avoue, tu t’es bien t’amuser ?, ça vous désole plus qu’autre chose et vous ne savez plus comment répondre. Oui, c’est une façon de vous donner la parole, mais teintée de cynisme, d’incrédulité, de clichés, voire de racisme, qui peut aussitôt vous couper l’envie de partager car vous voyez bien que votre interlocuteur n’est pas à l’écoute et s’est déjà fait son idée sur la question.

Mais alors où et comment on peut parler de son expérience et trouver des gens qui nous comprennent, sans forcément avoir directement recours aux coachs et psychologues spécialisés ?

Aller à la rencontre d’autres ex-expats
Qui mieux que ceux qui ont vécu la même expérience que vous pourrait vous comprendre ? Il y a partout en France des anciens expatriés qui brûlent eux aussi de partager et d’échanger sur leur vie à l’étranger et leur retour. Organisez des rencontres dans votre ville, vous pourrez échanger à souhaits. A Paris, le groupe “Ex-expats à Paris” a été créé l’été dernier sur la base du groupe d’entraide du retour en France. A vous de lancer l’initiative dans votre ville !

Nouer des contacts avec la communauté du pays où vous étiez expatrié
Vous pourrez continuer à pratiquer la langue, échanger des bons plans pour trouver des produits du pays, mais aussi être ainsi au courant d’événements intéressants. Fête nationale, festival de cinéma, concerts… Ce sont des occasions de rencontrer les ressortissants du pays ou des personnes qui en étudient la langue, la culture, et seront très intéressés par votre expérience et comprendront votre vécu dans ce pays.

Ecrire, peindre, dessiner
Un blog, un livre, une BD… Partagez par écrit, exprimez-vous avec une approche artistique, cela vous permettra de partager d’une autre façon. Vous trouverez un public ou vous connecter avec une communauté de personnes dans la même situation avec qui vous pourrez échanger. Si vous n’êtes pas prêts à lancer votre propre blog ou écrire votre livre, vous pouvez contribuer à celui de “Retour en France” sur Medium (et voilà comment faire), ouvrir un compte twitter, une page facebook dédiée.

Trouver d’autres plateformes adaptées
Votre expérience peut être particulièrement utile, par exemple pour certaines associations. Votre connaissance de la langue également peut être une ressource indispensable pour faire le pont lors d’échanges culturels. Vous avez été humanitaire dans un pays dont les ressortissants viennent se réfugier en France ? Votre connaissance du terrain, si elle est partagée en toute humilité, et non pas en conquérant qui a tout compris au pays dans lequel il n’habite déjà plus et dont il n’a pas vu toutes les facettes, peut être extrêmement précieuse aux bénévoles qui tentent d’aider ces personnes.

Vous pouvez également créer des plateformes de discussion et être source de proposition tout en recréant votre réseau. Avez-vous pensé proposer d’intervenir dans le cadre d’une association d’anciens élèves ? Combien d’étudiants se posent des questions sur leur avenir professionnel, rêvent d’expatriation, et seraient passionnés par votre parcours ? Vous pourrez les aider dans la construction de leur projet professionnel et de vie. Savoir qu’en ayant fait la même école, il peuvent trouver un emploi à l’étranger et vivre cette expérience sera une information de première main fort bienvenue. De même, une intervention dans une association professionnelle peut permettre de partager des trucs et astuces pour faciliter une installation à l’étranger à des collègues ou homologues.

Dans de nombreuses ville, il est possible de proposer à la bibliothèque ou médiathèque, au centre culturel municipal de parler du pays où vous avez vécu, tout en y exposant vos plus belles photos. Vous pouvez profiter de l’acquisition par la bibliothèque d’un ouvrage d’un auteur de ce pays ou d’un nouveau guide.

Pourquoi pas organiser un TedX de l’expatriation et du retour ? Partager pour inspirer.

Créer sa propre plateforme. Il est important de bien communiquer sur l’événement en amont, pour ne pas se retrouver devant une salle vide, mais même si peu de personnes sont présentes, peut être que la discussion n’en sera que plus riche. Ceux qui seront venus s’intéresseront réellement à votre discours et à l’angle que vous avez choisi d’aborder.

En écrivant ou en préparant une intervention, vous serez amenés à prendre du recul sur votre expérience, à faire des recherches supplémentaires, à rencontrer de nouvelles personnes. Au-delà de se soulager en pouvant enfin partager sur son retour, c’est une attitude pro-active qui fait que vous allez de l’avant, vous êtes vous-même l’acteur de votre retour. Cela permet de voir aussi des résultats et des jalons concrets : 3 articles rédigés, 1 chapitre clos, 1 planche de BD réalisée, 500 followers. Ce qui apporte une réelle satisfaction et des petites victoires dans son retour. Enfin, c’est l’occasion de développer vos compétences, rédactionnelles, relationnelles, communicationnelles, organisationnelles, créatives… qui peuvent également aider à convaincre les employeurs en plus de votre proactivité.

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Après plusieurs années de vie à l'étranger, je rentre en France. Petit journal de bord :) #expatriation #retour #retourdexpatriation