En route vers #teals : de nouveaux processus RH, l’évaluation

Philippe Pinault
5 min readNov 18, 2016

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Cette note est la deuxième d’une série visant à partager mes réflexions et travaux associés à notre progression sur le chemin d’une organisation plus agile, rapide et évolutive. Une organisation où chacun peut exprimer pleinement ses talents dans un cadre privilégiant l’entrepreneuriat. La notion #teals renvoie aux travaux de F. Laloux exposés dans son livre “Réinventer les organisations”. J’aborde dans cette note la question de l’évaluation chez talkSpirit, où nous pratiquons Holacracy depuis Sept. 2014

L’un des grands changements amené par l’adoption d’Holacracy concerne la différenciation entre les membres de l’organisation, les personnes que nous sommes des rôles que nous remplissons dans l’organisation pour la réalisation de sa raison d’être. Cela à l’air de rien, et pourtant, cette différenciation m’apparaît aujourd’hui comme l’élément le plus essentiel et une première étape vers Teals. Fini le temps où nous sommes à la fois qui nous sommes, la fonction que nous remplissons, le pouvoir que nous avons les uns sur les autres et tous ces masques portés selon les situations pour « faire le job ». La différenciation rôle — personne redonne à chacun la liberté d’être vraiment soi même au service d’un ou plusieurs rôle remplis pour une période donnée.

L’organisation devient donc une somme de « rôles à remplir », de « jobs-to-be-done » et progressivement, ce sont tout un ensemble de pratiques RH qui deviennent obsolètes et nécessitent d’être réinventées. Puisqu’il n’y a plus un manager pour évaluer son subordonné, alors comment évaluer ? Holacracy n’apporte aucune réponse, c’est d’ailleurs une excellente nouvelle : cela permet à chaque organisation d’écrire elle même ses propres règles en la matière ou bien à défaut laisse à un rôle tout l’autorité pour agir comme il l’entend dans ce domaine jusqu’à ce que des tensions se manifestent.

Travailler sur le « meilleur Fit » qui existe entre une ressource et les rôles qu’elle remplit est l’un des sujets qui me passionne dans la recherche de la meilleure performance d’une organisation. Comment identifier les meilleures ressources pour remplir les rôles, comment les évaluer, comment les renouveler, comment les accompagner dans la prise d’un nouveau rôle sont autant de questions qui se posent de nouveau à la lumière de cette nouvelle organisation.

D’un exercice imposé, le plus souvent réalisé en fin d’année et le plus souvent pollué par les questions d’ordre financière, nous avons repensé l’évaluation chez talkSpirit comme un outil disponible au service de chaque collaborateur qui souhaite à un instant donné recevoir le feedback de ses pairs dans les rôles qu’il remplit.

Aussi, lorsqu’une personne émet une demande d’évaluation, le processus suivant se met en place.

L’évaluation

Sur la base du volontariat, un comité d’évaluation est créé. Chaque membre du comité est amené à évaluer le membre qui l’a demandé à travers 2 axes :

  • Fit for Rôle : le membre remplit il de façon satisfaisante ou non les rôles qui lui ont été assignés
  • Fit for Org : le membre remplit il de façon satisfaisante ou non les valeurs de l’organisation

L’évaluation sur chaque critère donne lieu à un score (de -3 à +3) et, le cas échéant, un feedback pour aider le membre à progresser

Le membre qui a demandé son évaluation s’auto évalue également.

Le rôle Talents a la responsabilité du déroulé du processus, incluant la mise en oeuvre de l’outil d’évaluation (sur Google From) et la restitution. Cette dernière donne lieu à une réunion entre le membre ayant demandé à être évalué et le rôle Talents sur la base du document de synthèse de l’évaluation. Ce document présente la moyenne des évaluation obtenue pour chaque rôle et chaque valeur de l’organisation, la met en comparaison avec l’auto évaluation réalisée et restitue l’intégralité des observations réalisées par le comité, de façon anonyme. A la suite de la réunion de restitution, le membre peut ajouter des observations sur la façon dont il reçoit ces commentaires et le document est alors transmis à l’ensemble du comité d’évaluation.

Avant la mise en oeuvre de ce processus, j’intervenais dans quasiment la totalité des évaluations de mes collaborateurs car j’étais le plus souvent leur manager direct. Outre le temps nécessaire à la mise en oeuvre de chaque entretien, ce dernier ne pouvait être aussi objectif qu’une évaluation 360 comme nous la pratiquons à présent. Par ailleurs, les questions de rémunération s’invitaient assez souvent dans ces entretiens. Notre nouveau processus lève la plupart des tensions que j’observais alors. Le contenu délivré est beaucoup plus riche, plus objectif et a une vraie valeur pour celui qui le reçoit.

Prochaines étapes et réflexions

D’une logique Top Down, l’évaluation est devenue plus horizontale et fournit des enseignement précieux pour celui qui l’activé. J’y vois cependant une amélioration sur laquelle nous pourrons travailler dans les prochains mois : passer d’une évaluation ponctuelle donnant une photo à un instant t donné à une évaluation continue, permanente; au membre dans les rôles qu’il énergise. Je pense en particulier à une app facilitant la mise en place d’un feedback en continu de la même façon que celles qui permettent l’évaluation de la satisfaction d’un client pour établir ce qu’on appelle le NPS (Net Promoter Score). La mis en oeuvre d’un NPS appliqué en interne, par les rôles « clients » de mes rôles et plus largement tous ceux avec lesquels j’interagis est une piste et une idée d’application qui pourrait s’intégrer dans l’app market d’holaSpirit, une plateforme web dédiée aux organisations qui avancent sur le chemin teals, et celles en particulier ayant adopté Holacracy comme outil de gouvernance.

Une autre réflexion concerne les ressources évaluées. Par extension, pourquoi ne pas évaluer également les autres ressources qui participent, elles aussi, à la raison d’être de nos rôles. Nous avons par exemple un rôle « Bien être » dont la raison d’être est de délivrer une expérience « wow » à l’équipe. Quelle place donner à la ressource « lieu de travail », comment l’évaluer, comment l’améliorer au travers d’itération successive. Et les robots ? les automatismes en tout genre, qui remplissent eux aussi des rôles dans la réalisation de notre raison d’être. Comment les prendre en compte ?

Je reviendrai sur cette recherche du « meilleur fit » dans une prochaine note relative au recrutement et à l’affectation des personnes dans leur rôle.

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