La satisfaction de l’entrepreneur — #4 Extrait du mémoire de fin d’étude de YMJ

Yann-marie Johnson
6 min readMar 19, 2022

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LA QUESTION HABITUELLE DE LA SÉRIE…
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Avez-vous lu les précédents extraits? Rendez-vous ici pour lire le deuxième et le troisième. C’est important de le faire pour une bonne compréhension de ce troisième extrait.

ET, MAINTENANT ON PEUT CONTINUER!

En s’intéressant aux carrières des individus, Hall & Chandler (2005) ont apporté des éléments qui peuvent servir à la qualification de la réussite de l’entrepreneur. Leurs travaux montrent qu’il y a :

  • Une évaluation objective de leur carrière par les individus, celle-ci se mesure par le niveau de poste, la progression hiérarchique ou le niveau de rémunération ;
  • Une réussite subjective qui est celle de l’individu lorsque lui-même analyse son parcours par rapport aux objectifs qu’il s’est fixé. A ce sujet, Cooper et Artz (1995) ont d’ailleurs montré que “les individus dont les attentes seraient les moins hautes en termes économiques sont ceux qui seraient le plus satisfaits après trois années d’exercice.”

Évaluer objectivement la réussite de l’entrepreneur revient à s’intéresser à des indicateurs mesurables qui concernent ce dernier ou son entreprise. Cependant, on peut aussi évaluer la réussite subjectivement, le plus souvent en ayant recours à une approche qualitative qui fait primer la satisfaction de l’entrepreneur et son ressenti personnel.

La performance d’une entreprise était mesurée via les indicateurs financiers, en comparant son chiffre d’affaires, sa marge et son résultat par rapport à ceux des concurrents dans le secteur d’activité (St-Pierre et Cadieux, 2011). Des études ont montré que la croissance de ces indicateurs est perçue comme un signe de réussite par beaucoup d’entrepreneurs. En revanche, les entrepreneurs désirent la croissance à des degrés différents. Certains entrepreneurs veulent croître uniquement jusqu’à un point qu’ils jugent satisfaisant, par rapport à leurs objectifs personnels, familiaux et professionnels ; après ils vont privilégier la stabilité et donc le maintien de l’activité. A contrario d’autres vont davantage répondre au portrait dressé par Filion et Youaleu pour qui l’entrepreneur cherche sans cesse la croissance et le développement.

Plus généralement, les entrepreneurs peuvent rechercher différents types de performance. St-Pierre, Cadieux (2011) propose à ce titre un tableau qui répertorie les types de performances abordés dans la littérature, les indicateurs pour les mesurer, et les auteurs qui s’y sont intéressés. Ce tableau de synthèse (Figure 1), repris ci-dessous, dresse une liste des types de performances et des indicateurs qui y sont associés par les auteurs dans la littérature.

Tableau 1 : Extrait des travaux de St-Pierre, Cadieux (2011)

L’étude de St-Pierre, Cadieux, montre que la croissance est considérée comme indispensable, même si le degré d’importance varie. Elle est souvent évaluée à travers la taille de l’entreprise qui est un indicateur souvent mentionné ; on la mesure soit à travers le chiffre d’affaires ou bien à partir du nombre de collaborateurs de l’entreprise. Les autres indicateurs de performance économique sont plus ou moins pris en compte en fonction du sujet, de la discipline et de la méthodologie mis en avant par l’étude. L’équilibre entre santé financière, implication sociale et respect de l’environnement est un indicateur qui gagne du terrain dans les consciences avec la notion de responsabilité de l’entreprise. En ce qui concerne les indicateurs de performance personnelle, la littérature considère aussi le fait de créer son propre emploi, notamment pour les entrepreneurs individuels. Force est de constater cependant que la performance personnelle de l’entrepreneur a du mal à être interprétée objectivement à travers des éléments mesurables, mis à part le patrimoine personnel.

Lorsque l’entrepreneur ne réussit pas, il échoue. Pour mieux appréhender la réussite de l’entrepreneur, on peut s’intéresser au concept antagoniste, celui de l’échec entrepreneurial. Smida, Khelil & Zouaoui (2012) ont considéré l’échec de l’entrepreneur comme ayant plusieurs dimensions. La première dimension est la mort de l’entreprise et plus précisément le fait de ne pas réussir à maintenir la nouvelle entreprise en vie. La deuxième dimension serait une destruction ou une carence de ressources notamment sociales, financières ou humaines. La troisième dimension serait psychologique et concerne la perte de motivation de l’entrepreneur qui le pousse à arrêter ; ici l’échec est perçu “ en termes de déception personnelle de l’entrepreneur suite à la non-concrétisation de ses aspirations et attentes initiales “. Khelil (2011), définissait ainsi l’échec entrepreneurial comme : « un phénomène qui se manifeste par l’entrée de la nouvelle entreprise dans une spirale de défaillance économique (destruction des ressources) et/ou par l’entrée de l’entrepreneur dans un état psychologique de déception. À défaut d’un soutien financier et/ou moral, cet entrepreneur peut voir son entreprise disparaître “. Tout comme la réussite, l’échec peut donc être interprété objectivement à travers la situation de l’entreprise ou subjectivement à travers l’état psychologique de l’entrepreneur.

Pour certains auteurs comme Shaver (1995), la persévérance de l’entrepreneur qui persiste malgré les défis est essentielle. Il considère que la personne qui abandonne après un échec n’est pas un vrai entrepreneur. Afzalur (1996) quant à lui affirme que les entrepreneurs “ alternent entre l’extase du succès et les affres de l’échec, ils rebondissent pour revivre à nouveau. “ Cette citation permet d’amener le sujet de la gestion des doutes (Valéau, 2006), en introduisant des concepts comme celui de résilience et de rebond de l’entrepreneur. Elle permet également de constater que la réussite et le succès ne sont ni linéaires ni continues dans le temps. En effet, la littérature montre que le parcours de l’entreprise et son fondateur sont faits de haut et de bas, d’échecs et de réussites. C’est la capacité à rester optimiste et la persévérance pour maintenir ou développer l’entreprise qui va compter. L’échec peut s’observer à travers la dégradation des indicateurs de performance de l’entreprise ou lorsque l’entrepreneur perd sa motivation au point d’abandonner en mettant fin à son projet. Le tableau ci-dessous extrait des travaux de Khelil et al (2012), présente trois dimensions de l’échec qu’ils ont identifiées.

Tableau 2 : Extrait des travaux de Khelil et al (2012)

A l’échelle de l’entreprise, l’échec est constaté par la mort de l’entreprise et par la dégradation de la situation financière ou des résultats qui sont inférieurs à la moyenne du secteur. Lorsqu’on concentre l’analyse sur l’entrepreneur, on parle d’échec à partir du moment où il est déçu ou insatisfait suite à la non-concrétisation de ses aspirations et attentes initiales (Cooper et Artz, 1995). Bien que difficile à mesurer, la satisfaction de l’entrepreneur est un critère qui est pris en compte pour apprécier sa réussite. Les auteurs qui se sont intéressés au sujet de la satisfaction de l’entrepreneur ont montré qu’elle est positivement influencée par la performance économique de l’entreprise. Nabil Khelil (2018) dans ces travaux a montré qu’il est indispensable d’aller plus loin et prendre en compte d’autres dimensions pour apprécier la satisfaction de l’entrepreneur ; dans une de ses études il propose les indicateurs suivants :

  • Satisfaction de l’entrepreneur vis à vis de sa situation personnelle,
  • Satisfaction de l’entrepreneur par rapport à sa situation familiale/sociale,
  • Et satisfaction de l’entrepreneur concernant son expérience entrepreneuriale.

Par ailleurs, Cooper et Artz (1995) montrent dans leurs travaux que les entrepreneurs ayant des objectifs économiques ont tendances à être moins satisfaits que ceux qui ont des objectifs non économiques, comme gagner en autonomie ou avoir un équilibre travail/vie privée. Ces derniers sont généralement plus satisfaits, y compris si leur entreprise a une mauvaise situation économique. Or, des études ont montré que la satisfaction chez l’entrepreneur stimule sa motivation et le pousse à poursuivre l’aventure entrepreneuriale. Parfois alors même que l’entreprise est défaillante et détruit plus de ressources qu’elle n’en produit, l’entrepreneur satisfait persévère. Ce phénomène fait de nouveau remarquer l’importance de distinguer la réussite de l’entreprise, de celle de l’entrepreneur. A contrario lorsque l’entrepreneur est insatisfait, il a davantage de chance d’abandonner et l’entreprise a donc plus de chance de mourir.

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Yann-marie Johnson

Entrepreneur dans l’âme, je suis stimulé par la découverte, les rencontres, le partage et les résultats mesurables. 🤠