Rendre vivant ce présent qui nous fuit

Lettre à une Maman blogueuse

Stéphanie Piou
Durable et Solidaire
7 min readJan 25, 2018

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Crédit photo : Stéphanie Piou

Chère Maman Poule,

Nous ne nous connaissons pas, et pourtant… Je te lis régulièrement, sur ton blog Happynaiss, et tu m’as parfois apporté chaleur et réconfort dans des moments difficiles. Je pense en particulier à cette période où, nuit après nuit, nous vivions des réveils intempestifs, des pleurs, jusqu’à des vomissements incompréhensibles ; où soirée après soirée, nous subissions des endormissements anarchiques, à nous casser le dos pendant des heures. Je suis passée par des montagnes russes physiques et émotionnelles, et je détestais mon inconstance. Ton article sur le sommeil de ta Mademoiselle Carrousel m’a arraché des larmes, m’a redonné de la force, a ré-éclairé ma voie, celle auquel je crois, celle qui m’anime : l’amour et la bienveillance. Pour cela, pour ces mots qui dansent pour toi, merci infiniment.

Ce matin, je t’ai lue à nouveau, et ton désarroi à résonné en moi. Tu décris à merveille ce déchirement que subissent tant de personnes, et en particulier tant de parents. Nos bout’chous grandissent, s’épanouissent, deviennent chaque jour plus autonomes, plus capables. Leurs progrès alimentent chez nous une profonde fierté, mais crient la disparition ineluctable de l’instant présent. Nous souviendrons-nous de ce fou-rire partagé ? Nous souviendrons-nous de la chaleur et du sourire immense de cette “première fois” qui vient de se présenter ?

(…) je suis ainsi faite que ma tête est toujours pleine, ma liste de choses à faire toujours longue, mon regard toujours tourné vers demain. Ce demain qui devient aujourd’hui à mon insu.

Happynaiss

Tu culpabilises de ton état d’esprit, souvent happée par tes to-do lists, les soucis du lendemain… Toutes ces choses parasitent ton présent, ils te dérobent la lumière des instants partagés avec tes filles, et le pétillement des souvenirs qui en restent.

La communauté que tu as créée autour de tes mots témoigne d’une évidence : nous sommes très nombreux à vivre ainsi. Notre présent disparait sous les tempêtes conjointes de notre passé comme de notre futur. Ce n’est pas un hasard, je pense, si je me suis retrouvée dans la matinée face à une affiche bien connue où le Dalaï Lama résume toute l’ambiguité de cette affliction partagée :

Ce qui me surprend le plus chez l’homme occidental, c’est qu’il perd la santé pour gagner de l’argent et il perd ensuite son argent pour récupérer la santé.
À force de penser au futur, il ne vit pas au présent , et il ne vit donc ni le présent ni le futur.
Il vit comme s’il ne devait jamais mourir, et il meurt comme s’il n’avait jamais vécu.

Dalaï Lama

Apaise donc ta colère contre toi-même… Tu fais déjà tant, avec cette intention si belle de donner ce qu’il y a de mieux ! Les mots de chacune de tes lectrices reconnaissent l’ampleur de tes efforts… Et si tu t’en réchauffais, l’espace d’un instant ? Et si tu t’offrais quelques gouttes de cette bienveillance qui coule en torrents pour tes filles ? Peut-être en résulterait-il un instant de sérénité que vous pourriez partager ensemble ?

Qui je serai quand la maternité ne m’aspirera plus à 300% ?
Je n’ai pas de réponse mais j’ai un élan.

L’élan qui donne envie de changer.

Happynaiss

Cette tristesse que tu ressens, ce déchirement qui te fait souffrir, je les connais bien moi aussi. Ce sont eux qui m’ont poussée à une remise en question complète pendant et après ma grossesse. Tu reconnais en toi le besoin du changement. Il ne manque plus que la décision profonde d’agir, c’est elle qui est la clé. Tu as déjà identifié plusieurs leviers, tu sais ce qui draine ton énergie, tu reconnais ce qui ne t’apporte pas de joie et à contrario ce qui fait pétiller ta vie. Alors bravo, c’est déjà beaucoup ! Dès que la décision sera mûre en toi, dès que la volonté de profiter pleinement aura eu raison de tes peurs, tu pourras progresser très vite sur ton chemin.

L’élan qui donne envie de changer.

De me bousculer encore un peu, de laisser tomber certaines choses, de dire non à certains et oui à d’autres.

De ranger mon téléphone dans un tiroir et de débrancher mon clavier quand je suis avec mes filles pour être plus là pour de vrai.

De faire encore plus ce qui me fait oui, sans me poser de questions.

Happynaiss

J’ai écrit dernièrement sur l’importance de se laisser le temps de mûrir le changement, et sur celle d’écouter “ce qui nous fait oui”. La décision de changer, une fois prise, ne signifie pas forcément une immense révolution dans sa vie, d’écrire dans la foulée une lettre de démission... Mais elle permet d’embrayer directement sur de l’action, même à toute petite échelle. Et la solution à ton déchirement n’est peut être pas loin…

À la lecture de tes lignes, j’ai eu envie de partager avec toi un test que j’ai fait il y a quelques semaines: j’ai maîtrisé mon esprit de contradiction et mon aversion pour les “buzz” pour essayer la méditation. Un concept dont j’avais entendu parler, comme beaucoup, mais je n’avais aucune idée de la manière de débuter sans m’ajouter une contrainte impossible.

J’ai découvert qu’il existe des applications de méditation francophone (mais pour quoi n’existe-t-il pas d’application de nos jours ?). Je me suis résolue à en essayer plusieurs, pour voir. Elles ont souvent un programme d’initiation qui demande 10 à 15 minutes par jour. Je les ai calé au petit bonheur au début, au gré de notre rythme — ou parfois absence de rythme.

Dès les premiers jours, je me suis trouvée confrontée à ce phénomène d’être absente de là où mon corps était présent. Au-delà de la séance de méditation elle-même, c’est devenu d’un coup évident dans les moments avec mon fils : la tétée où je sortais mon téléphone “pour optimiser le temps”, le moment de jeu où je pensais à autre chose… La méditation s’est très vite montrée comme un outil incroyable : en passant une dizaine de minutes à s’entrainer à être pleinement présent à soi-même, l’effet rayonne dans tout le reste de la journée et fait réellement pétiller les instants précieux.

Il m’arrive maintenant régulièrement de passer de longs moments à jouer avec mon fils ou à échanger avec mon mari, entièrement là avec eux, et j’ai conscience de la qualité de notre partage et du fait que cela m’était inaccessible avant.

Ainsi, peut-être qu’une dizaine de minutes par jour, pendant quelques jours, pourraient transformer radicalement la qualité de ta présence avec tes filles, et lever du même coup la culpabilité qui t’assaille. Je te préviens, on y prends très vite goût ^^. Et si ça ne marchait pas ? Qu’aurais-tu perdu ? Est-ce que l’enjeu ne vaut pas un petit essai ?

Si tu souhaites tenter le coup, voici les deux applications que j’ai essayé :

  • Petit Bambou est visiblement l’application reine du marché français. Ils proposent un programme de découverte gratuit de 8 séances, qui introduit les fondamentaux de la méditation (positions, approche…). La progression est bien pensée, je ne me suis sentie ni dépassée ni faire du sur-place. Il est d’ailleurs toujours possible de refaire une séance qui a plu ou qui a paru difficile. Il y a un côté bien pensé dans cette application : au sein d’un parcours, la session suivante se télécharge automatiquement quand on a fini celle en cours. Tout est donc prêt si on veut poursuivre, même si on souhaite méditer dans les transports… ou en mode avion pour éviter les interruptions. Les programmes proposés sont alléchants, j’ai eu envie de tous les faire. L’abonnement est semestriel à 41,99€ (donc 7€/mois), cela représente donc malgré tout un certain engagement.
  • Mind est la seconde application que j’ai trouvé intéressante. De prime abord j’ai été un peu décontenancée, car je me suis retrouvée projetée sans transition dans la première séance, sans possibilité de découvrir le programme… Mais cette surprise a été vite dépassée car toutes les informations importantes sont trouvées dès le début. En particulier ce qui ne m’avait pas paru aussi clair auparavant : il n’est pas question d’étouffer les pensées mais de les laisser être et savoir les regarder “de loin” avec détachement, d’apprendre à ne pas se laisser embarquer par elles si ce n’est pas ce que l’on souhaite. La voix est chaleureuse mais il faut savoir que les programmes d’initiation sont faits par un homme à l’accent anglais assez marqué. Cela a été une source de distraction pour moi au début, mais je m’y suis vite habituée. Le programme gratuit est complet, cohérent et constitue une bonne progression. Il aborde dans la 6e séance les émotions, et cela m’a semblé une séance très importante qui n’était pas proposée dans le parcours découverte de Petit Bambou. J’ai finalement tellement accroché que je n’ai pas résisté à cesser là mes tests, et à m’abonner à Mind pour poursuivre mon approfondissement de leurs programmes. Il y a un abonnement mensuel à 6,99€/mois ou annuel 69,99€/mois, mais ils vendent des cartes 6 mois, 12mois ou à vie sur leur site Internet qui sont moins chères. Le seul bémol que je vois par rapport à Petit Bambou est l’impossibilité de suivre les méditations en étant hors ligne / mode avion. Pour moi ce n’est pas gênant, mais pour quelqu’un qui aurait un temps de transport conséquent, cela peut être un argument.

Et il y en a sûrement d’autres ! Je ne suis vraiment pas déçue d’avoir débuté avec une application, qui permet de s’offrir ce moment de méditation vraiment quand on le veut (ou peut !) et sans avoir à faire des trajets pour aller à un cours, avec le temps perdu, le stress…

J’espère avoir, par ces quelques lignes, pu t’apporter un semblant de réconfort comme tes articles ont pu m’en offrir par le passé. Et peut-être également t’avoir donné l’envie d’agir à la source sur cette sensation de ne pas être complètement là alors que c’est important pour toi, pour vous. C’est très courant, mais ce n’est en rien une fatalité. Il suffit de décider. À te lire, j’ai bien senti ta force, et je ne doute pas une seule seconde que tu serais capable, si tu le décidais, de transformer ta vie et ces instants.

Je te souhaite beaucoup de moments pleinement vécus, quels qu’ils soient.

Avec mon amitié par articles interposés,

Stéphanie

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Stéphanie Piou
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