Ne confondez pas gentillesse et lâcheté.

Nicolas Galita
Dépenser, repenser
21 min readAug 10, 2018

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On appelle souvent “gentillesse” ce qu’on devrait en fait appeler “lâcheté”. On devrait fuir ce comportement, pas le glorifier. Je suis choqué à chaque fois qu’on me légitime un comportement toxique par “c’est gentil”. Ou qu’on commente un comportement courageaux en le qualifiant de “c’est méchant”.

Définition de la gentillesse

Avant toutes choses, entendons-nous sur une chose : la vraie gentillesse n’est pas une question de lâcheté. Mais le terme est tellement galvaudé autour de moi que, 9 fois sur 10, quand on me dit “gentilesse” on veut me dire “lâcheté”.

Par gentillesse on entend souvent (à tort) la faculté à faire les choses pour autrui, au sens large. Cette notion de sacrifice de soi pour quelqu’un d’autre. Par exemple, je laisse l’autre choisir le restaurant parce que je ne veux pas le froisser, quitte à aller dans un restaurant que je déteste profondément.

En résumé, on va donc parler de l’envie de plaire à autrui au détriment de son propre bonheur. Le sacrifice que l’on fait uniquement pour être bien vu par quelqu’un d’autre ou faire son bonheur en cachette. À partir de maintenant on va la nommer “gentilesse” pour reprendre le vocabulaire que j’entends autour de moi.

Je n’ai rien contre la gentilesse bienveillance. Interagir avec les autres sans intention de leur nuire ou de se moquer d’eux est la meilleure posture. Je n‘ai rien non plus contre l’altruisme. C’est-à-dire le plaisir d’aider les autres. Il ne s’agit plus d’un sacrifice si je prends un plaisir sincère à aider. Dans ce cas là je ne le fais pas seulement pour les autres, je le fais pour les autres… et pour moi.

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La “gentillesse” est une lâcheté

Comme je vous le disais, on parle souvent de “gentillesse” sans se rendre compte qu’on parle de lâcheté pure et dure.

Par exemple, se sacrifier pour les autres sans leur demander leur avis est d’une lâcheté sans nom. Vous ne comptez pas moins que les autres. Encore une fois, je parle de sacrifices qui ne nous font pas plaisir. Je n’ai rien contre le fait de rendre service parce qu’on aime rendre service. Je parle de renoncer à contrecoeur à son désir pour laisser quelqu’un d’autre accéder au sien.

Je travaille à ce que chaque jour soit pour moi toute une vie. Et vraiment, je le saisis au vol, non comme s’il s’agissait du dernier, mais dans l’idée qu’il pourrait l’être. (…) Prends garde de ne jamais rien faire à contrecœur.

Je parle de mentir. Je parle de ces situations où l’on cache ses désirs. Les raisons qui justifient solidement un mensonge sont bien plus rares que l’on ne pense. En cours de philosophie on prend toujours le même exemple : évidemment qu’il faut mentir si l’occupant vous demande de dénoncer la famille juive que vous cachez. Mais ce type de configuration est extrêmement rare. J’ai fait le choix d’augmenter drastiquement mon niveau d’honnêteté dans mes relations. Au début c’était surtout pour imiter Steve Jobs pendant quelques jours et voir ce que ça faisait (oui, je sais, je sais). Je venais de lire sa biographie. Et, à force de le faire, je me suis rendu compte que dans l’immense majorité des cas où je pensais mentir pour protéger quelqu’un, je mentais pour protéger ma propre image.

J’ai été choqué par le nombre de situations où j’ai découvert qu’en fait l’autre n’accordait pas tant d’importance à cette vérité que je cachais pour le protéger. Plus souvent qu’on ne se l’avoue, le problème est dans notre rapport au regard des autres. Regard réel ou fantasmé d’ailleurs. Or, ne pas être soi par peur du regard des autres est la lâcheté suprême. C’est d’ailleurs le regret le plus fréquemment exprimé par les gens qui savent qu’ils vont bientôt mourir :

Je regrette de ne pas avoir eu le courage de vivre une vie où j’étais vraiment moi-même, plutôt que la vie que les autres attendaient de moi.

Ce concept est illustré par une histoire qui m’a pris aux tripes (je vous ai mis le livre d’origine dans les sources en annexe). C’est l’histoire d’une dame à qui on découvre une maladie terminale. Elle ne fume pas. Et pourtant c’est bien la cigarette qui lui a déclenché la maladie. Celle de son mari qui fume à la maison. Mari qui la maltraitait depuis cinquante ans. Le niveau d’ironie est cruel.

“Pourquoi n’ai-je pas simplement fait ce que je voulais ? Pourquoi l’ai-je laissé me commander ? Pourquoi n’ai-je pas été plus forte”, me demandait-elle régulièrement. Elle était tellement en colère contre elle-même, de ne pas avoir trouvé le courage.

Ne laisse jamais personne t’empêcher de faire ce que tu veux, Bronnie, me dit-elle. Promets-le à cette vieille femme mourante, s’il te plaît.
(…)
Mourir. Mourir ! Comment j’ai pu attendre toutes ces années pour être libre et indépendante et que ça soit trop tard ?
(…)
Elle n’était pas contre le mariage (…) elle était contre la doctrine de sa génération qui disait qu’on doit rester au sein d’un mariage, peu importe ce qu’il arrive. Et donc elle a, pendant tout ce temps, fait une croix sur son propre bonheur.
(…)
Grace avait maintenu les apparences et vécu de la manière qu’on attendait d’elle, pour prendre conscience seulement maintenant que ce choix avait toujours été son choix et qu’il reposait sur la peur.”

Si vous ne deviez retenir qu’une seule chose, retenez cette histoire. Se laisser marcher dessus est lâche. Surtout quand la principale motivation est la peur du conflit. Rien de bon ne peut sortir de la peur du conflit. Je ne suis pas en train de dire que le conflit est la seule manière de régler les problèmes. Je suis en train de dire que d’avoir une peur irrationnelle du conflit fausse toutes les prises de décision. Tomber n’est pas désirable mais si vous faites du vélo avec la peur constante de tomber, vous ne pourrez jamais rouler correctement. Vous risquez même de devenir dangereux pour les autres.

Exprimer et faire valoir sa volonté demande du courage. On ne nous le dit pas assez. L’école ne nous le dit pas assez, nos parents ne nous le disent pas assez, les films ne nous le disent pas assez. Mais le simple fait d’exprimer et défendre sa volonté est un acte courageux. Ça demande d’être suffisamment bien avec soi-même pour agir sans anticiper en permanence ce qu’en penseront les autres. Ça demande d’être suffisamment bien avec soi-même pour être le premier à dévoiler ses cartes.

Bien entendu, pour faire valoir ce que l’on veut, il faut déjà savoir ce que l’on veut. Et ne vous laissez pas tromper par l’évidence de la tournure : cette tâche est une des plus ardues de nos vies. La plupart du temps nous fuyons notre propre volonté. Si vous ne savez pas ce que vous voulez, quelle est votre identité ? Parmi les personnes qu’on appelle “les gentils”, j’en ai rencontré qui sont perdus sans personne pour qui se sacrifier. Ils ne savent plus qui ils sont sans quelqu’un d’autre. Ils n’arrivent pas à exprimer une volonté autrement qu’en se positionnant par rapport à une autre volonté.

Ce manque de courage n’est pas neutre. Quand vous remettez la volonté dans les mains de quelqu’un d’autre, vous lui remettez le travail dans les mains. Vous profitez de son travail d’introspection, vous profitez de son élan, vous profitez de sa prise de risque. On oublie bien trop souvent que les autres aussi ont peur. Même ceux que vous admirez, même ceux dont vous avez l’impression qu’ils surmontent tout sans peine, même ceux qui sourient tout le temps.

Mettre sur un piédestal, c’est aussi une façon de ne pas chercher à voir les yeux de l’autre, son âme derrière des postures de guerrier.

La “gentillesse” est sournoise

Si encore ce n’était qu’un problème de manque de courage ce ne serait pas grave. Mais en fait cette forme de gentillesse est souvent un coup en traître. Quand quelqu’un fait quelque chose “pour moi” il me charge d’une dette que je ne lui ai pas réclamée. Je me retrouve donc avec une dette invisible alors que je pensais avoir bénéficié d’un service altruiste.

D’ailleurs, vous n’avez pas remarqué que la révélation ne se passe jamais bien ? Quand quelqu’un annonce “j’ai fait ça pour toi”, la réponse n’est jamais “oh merci ! Je t’adore”. Non, la réponse est systématiquement une dispute. Pour une raison simple : comment vous sentez-vous lorsqu’on vous annonce qu’un service était payant après que vous l’ayez consommé en pensant que c’était gratuit ?

Si tu m’veux du bien pourquoi j’me sens trahi ? Pourquoi j’me sens haï ?

Dernièrement, j’ai acheté de quoi déjeuner à La Défense (oui, malheureusement, ça m’arrive encore de me retrouver à La Défense). Je passe donc commande. Pendant la commande, le vendeur me demande si je veux du pain. Je réponds que oui, plus par flemme de dire non que par réelle envie de pain. Viens le moment de régler. Je ne comprends pas d’où vient la petite différence entre le prix affiché au menu et le prix qu’il me demande de payer. Il m’explique que “le pain est payant”. Je peux vous assurer que je ne remettrai jamais les pieds dans ce “restaurant” : je me suis senti trahi. Le pain, je n’en avais même pas vraiment envie et si j’avais su que ça coûtait le moindre centime j’aurais dit non.

Pourquoi je vous raconte les détails insignifiants de ma vie ? Parce que ça illustre à merveille ce concept de rendre service à quelqu’un sans lui demander son avis, puis de lui présenter une facture émotionnelle.

Généralement, les narratifs s’entrechoquent alors. D’un côté la personne “gentille” affirme “j’ai renoncé à mon rêve pour toi”. D’un autre côté, son interlocuteur lui rétorque “mais je pensais que ça te faisait plaisir de me rejoindre à Paris”. Dialogue de sourd.

J’ai mis du temps à comprendre le proverbe “ce qui est fait pour moi, mais sans moi, est fait contre moi”. Pourtant tout y est dit. Il y a un côté malsain à faire quelque chose prétendument pour autrui tout en lui cachant. Si vous faites quelque chose pour moi…pourquoi me le cacher ?

Voilà le contrecoup, comme dit l’ancien : “Tout ce qui est fait pour nous mais sans nous est fait contre nous" (…)Car, si la vérité blesse, sache que le mensonge tue.

Sans compter que personne ne sait lire dans les coeurs. Vous êtes donc en train de présumer mon avis. Vous croyez le connaître mais ça sera toujours un pari, un pari risqué. Car vous n’êtes pas la mesure universelle du monde. L’autre ne fonctionne pas forcément comme vous. Ce n’est pas en lui donnant ce que vous auriez aimé qu’on vous donne que vous allez lui faire plaisir.

Je sais que la démarche a l’air noble, je sais que ça s’inscrit dans une sorte de fiction héroïque, je sais qu’on se dit “je me sacrifie car je suis gentil” mais ce n’est pas noble, ce n’est pas beau, c’est juste condescendant. Retenons-le une fois pour toutes : si vous voulez savoir comment faire plaisir à quelqu’un, demandez-lui. Sauf quelques rares exceptions (un cadeau surprise par exemple), ce qui est fait pour moi mais sans moi est fait contre moi.

Il faut fuir les gens “gentils”

En définitive, la gentillesse est une mauvaise valeur. La bonne valeur est la vérité. Je crois que je n’ai jamais entendu le mot “gentil” utilisé autrement que de manière aveuglante. On devrait s’interdire d’employer les termes de “gentil” et “méchant”. La vie n’est pas un film de Disney : personne n’est gentil ou méchant. Vous avez plutôt des humains qui courent chacun derrière leurs propres intérêts, selon leur propre vision du monde. On ne devrait pas dire d’un adulte qu’il est “gentil”. On dit ça à un enfant, pour l’encourager dans un comportement. C’est d’ailleurs le souci : il s’agit d’un moyen d’infantiliser.

Un exemple de l’aveuglement que provoque l’utilisation du mot gentil : quelqu’un m’a dit récemment “je n’aime pas les gentils garçons”. Je lui ai répondu “non, ce que tu n’aimes pas ce sont les garçons fades. Les personnes que tu me décris ne sont pas plus gentilles que moi, elles sont simplement plus lisses. Quelqu’un qui dit uniquement ce qu’on est censé dire pour plaire n’est pas gentil : il est juste sans saveur.”

D’ailleurs, l’appel à la gentillesse est un classique quand on essaie d’empêcher une personne de réclamer ses droits ou de sortir du rang. Combien de fois avez-vous entendu dire que les féministes ou les vegans desservent leur cause car ils sont trop agressifs ? Vous ne pouvez pas exiger de quelqu’un qui croit profondément que tuer des animaux est un crime qu’il soit “gentil”. Forcément que son combat sera violent. On ne lui demande pas d’être gentil, on lui demande d’être courageux. Que vaut la gentillesse quand elle est tiédeur ?

Je connais tes oeuvres. Je sais que tu n’es ni froid ni bouillant. Puisses-tu être froid ou bouillant ! Ainsi, parce que tu es tiède, et que tu n’es ni froid ni bouillant, je te vomirai de ma bouche.

Au final, cette gentillesse n’est pas saine. Parfois je dis la vérité pour aider quelqu’un et sa seule réponse est “c’est méchant ce que tu dis”. Je suis toujours désarçonné par cette réponse. Je n’arrive pas à le comprendre autrement que comme un manque de maturité : le réflexe de s’en prendre au messager plutôt que d’accepter le message.

Pourquoi faut il vous mettre sur vos gardes quand vous repérez quelqu’un de “gentil” ? Parce que la gentillesse (au sens de vouloir plaire à autrui) est souvent le signe d’un problème de construction mentale. Par exemple, les personnes qui ont une très faible estime d’elles-mêmes ont une forte tendance à verser dans cette gentillesse. Logique après tout : quelqu’un qui s’aime vraiment ne se sacrifiera jamais pour autrui. La dernière fois qu’on m’a dit “j’ai fait ça pour toi, je suis venue ici car je savais que ça te faisait plaisir à toi, mais j’en avais pas envie”, la conversation a fini sur le thème de l’amour de soi.

Et c’est ici qu’advient le danger. Certaines personnes iront plus loin : elles vont commencer à se raconter l’histoire de la victime. Qu’est-ce que l’histoire de la victime ? C’est cette tendance à raconter le monde et les événements de manière à toujours se donner le rôle de la personne qui subit. On le fait tous, moi le premier. De temps en temps ça défoule de crier que si je me suis cogné l’orteil c’est la faute de la table. Ce qui est problématique c’est quand on se la raconte tellement souvent qu’on finit par y croire. Ça vous donne des gens paralysés qui ont l’impression de subir la vie en permanence.

Pire encore, comme ils sont trop “gentils” pour dire la vérité, ils peuvent vite sombrer dans la médisance. Car ce n’est pas parce qu’ils ne disent pas qu’ils n’en pensent pas moins. La tentation est alors grande d’aller s’en plaindre à quelqu’un d’autre. Ils vous reprochent de ne pas voir tout ce qu’ils font pour vous…mais auprès de quelqu’un d’autre. J’ai vu des groupes d’amis se déchirer à cause de ce type de paroles. Car, quelqu’un de normalement constitué présumera que si vous lui racontez ça c’est vraiment que l’autre vous écrase et vous domine tellement que vous n’osez pas lui dire. C’est toujours une mauvaise idée de vous plaindre de votre partenaire à d’autres personnes. Enormément de malentendus et de guerres froides seraient instantanément résolus si on parlait du sujet avec la personne concernée plutôt qu’avec d’autres.

Parfois, on finit même par avoir des comportements cruels par “gentillesse”. Prenez l’exemple du ghost. Si vous ne savez pas ce qu’est le ghosting, vous avez de la chance. En résumé, cela consiste à arrêter subitement de répondre à quelqu’un avec qui vous aviez commencé (ou terminé) un processus de séduction. Du jour au lendemain, plus de nouvelles. Je l’ai déjà fait. Et à chaque fois je me racontais que je ne savais pas quoi faire d’autre. Puis un jour je l’ai vécu de l’autre côté. C’était tellement violent que je me suis promis de ne plus le faire.

Je sais c’que tu penses de nous quand tu dis que tu n’sais plus quoi penser de nous.

Je sais c’que tu veux vraiment quand tu dis que tu n’sais plus c’que tu veux vraiment.

Je sais qu’tu n’as plus le temps quand tu dis que tu penses qu’il te faut plus de temps.

J’ai donc pris mon courage à deux mains pour reprendre contact avec les personnes que j’avais ghostées afin de leur expliquer clairement ce que j’avais en tête. Vous devinez la suite…les personnes m’ont remercié. Voilà le paradoxe : on dit qu’on veut protéger les autres et pourtant ils nous remercie quand on ne les protège plus. Parce qu’en fait on se protège soi-même.

Plus une personne est “gentille”, plus elle aura tendance à s’échapper via le ghost. Le silence est pourtant la forme la plus aboutie de mépris. Le silence est pourtant la réponse la plus violente. Le silence est cruel. Pourtant, ceux qu’on appelle “gentils” choisissent systématiquement cette option.

J’ai pris le ghost comme exemple car le phénomène est universel mais des histoires d’horreurs de “gentils”, je pourrais vous en raconter tout un livre. Il y a une raison pour laquelle on dit que le chemin de l’enfer est pavé de bonnes intentions. J’ai déjà découvert que des gens m’en voulaient “grâce” à une proche qui se plaignait de moi auprès d’eux, plutôt que de se plaindre auprès de moi, sur des sujets que je ne soupçonnais même pas. J’ai vu des couples se détruire parce que l’un décidait de suivre sa passion artistique mais que l’autre lui révélait qu’il avait renoncé à la sienne pour le bien du couple, sans lui dire.

Le mensonge est un soulagement qui finit par nous désunir

Voilà pourquoi vous avez deux options : fuir les gentils ou les convertir à la vérité. Sinon vous prenez le risque de vous enfermer dans deux mondes différents. Croyez-moi : on sous-estime systématiquement l’ampleur de la traîtrise. Et quand vous l’apprenez par la bouche de l’autre ou par la bouche des gens à qui il se plaignait, la déflagration est toujours surprenante. On sous-estime également à quel point une autre personne peut avoir du désamour pour elle-même. Les individus qui s’aiment énormément ont tendance à être aveugle à l’auto-désamour des autres.

Ce n’est même pas une question de morale. Je ne suis pas en train de vous faire une leçon de morale sur le fait que la vérité est moralement supérieure. En fait, la vérité est tout simplement plus efficace pour communiquer. Se comprendre est déjà tellement compliqué que si vous ajoutez un autre critère que la vérité, ça devient mission impossible. En tout cas tant qu’on aura pas inventé la télépathie.

Réponses aux questions les plus courantes

La première fois que j’ai fait lire cet article j’ai eu beaucoup d’incompréhensions similaires qui sont revenues. J’ai essayé d’améliorer l’article pour le clarifier mais je pense qu’il manque encore un poil de clarté. J’espère y remédier avec cette rubrique.

Question #1 : tu veux dire “nice always finish last” ou “trop bon trop con” ?

Non. Pas du tout. Si vous avez compris ça je suis passé à côté de mon objectif. Bien au contraire, je pense fondamentalement qu’il faille toujours être le plus bienveillant possible. Justement, il me semble que la bienveillance ne peut être sincère que si on dit la vérité. Sinon on se sert juste des autres pour se complaire dans une bonne image de soi. Ce que je dénonce ce n’est pas la bienveillance mais bien le manque de courage.

Question #2 : ah oui donc il faut que je dise leur 4 vérités aux gens ?

Non, malheureux ! Surtout pas ! En fait c’est exactement l’inverse. L’expression “dire ses 4 vérités” est l’inverse de ce que je propose. Premièrement parce que ça sous-entend que vous mentez pendant une période d’accumulation puis quand vous en pouvez plus vous explosez. Et bien c’est exactement ce que je dénonce chez les gens “gentils”.

Deuxièmement, parce que ça laisse supposer que vous pouvez détenir la vérité dans un conflit. Ne confondez pas la vérité et vos émotions. Dire à quelqu’un “tu es stupide” est quasiment toujours un mensonge. En vrai vous n’en savez rien. Ce que vous savez c’est que vous pensez que la personne est stupide. Et ça n’a pas grand intérêt de le dire. Dire à quelqu’un “tu es énervant” a peu d’intérêt. Il vaut mieux assumer que vous êtes énervé (la subtilité est importante) et expliquer ce qui vous a énervé, en acceptant que vous êtes responsable de vos émotions.

Troisièmement, l’intention est clé. Si votre intention est de blesser, ce n’est plus une question de vérité. Encore une fois : la vérité n’est pas une excuse derrière laquelle se cacher pour être malveillant.

Question #3 : mais si je ne connais pas la personne ?

Excellente question. Le degré de vérité que l’on peut dire dépend du degré d’intimité. Pour une raison simple : vous manquez d’information. Par exemple vous ne savez vraiment pas comment la personne va réagir, quel est son vécu, si on lui a déjà dit ce que vous allez dire. Vous pouvez dire à votre ami intime qu’il est en surpoids. N’allez pas dire ça à quelqu’un dans la rue. Sauf si cette personne vous arrête et vous le demande explicitement.

Question #4 : je déteste les gens qui se passent les nerfs sur les autres en disant “c’est comme ça que je suis”, c’est ce que tu proposes ?

Non, pas de panique : je déteste ça aussi. La colère ne peut pas dire la vérité. La colère est un raccourci qu’on utilise pour se donner du courage et dire ce qu’on n’oserait pas dire autrement. Donc quand je parle de vérité, il est hors de question de parler sous le coup de la colère. Avant de parler à quelqu’un il est de votre responsabilité de vous calmer.

Question #5 : mais si la personne ne peut rien changer, est-ce utile ?

Plus compliqué…j’ai fait une conférence la braguette ouverte chez un client. Mes deux collègues présents au premier rang l’ont vu. Ils me l’ont dit après coup. Aurait-il mieux valu ne rien me dire ? Ça se débat. Au final je suis content de l’avoir su car ça a failli m’arriver à nouveau. Sauf que cette fois j’étais vigilant. Je pense que la vérité est plus importante que l’utilité présumée. Parce que l’utilité vous ne pouvez pas la savoir à place de l’autre. Mais je comprends qu’on pense l’inverse. Ou alors qu’on choisisse que certaines choses ne valent pas le coup.

Hey ! Attends :D

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Conclusion

Si vous avez besoin d’une astuce pour savoir si vous êtes en train de manquer de courage, demandez-vous pourquoi vous mentez. Le mensonge peut être noble mais les cas sont tellement rares qu’en cas de doute choisissez toujours la vérité. La plupart du temps vous réaliserez que vous mentez pour préserver votre propre image. Et c’est le début de la fin. Mettez-le doigt dans cet engrenage et vous êtes piégé.

Si vous avez besoin d’une astuce pour savoir si votre sacrifice est légitime, demandez à l’autre personne concernée. Vous voulez renoncer à votre passion artistique pour assurer les revenus de votre foyer ? Parlez-en à l’autre personne du foyer (puisqu’un foyer est composé d’un minimum de deux personnes) et voyez ce qu’elle en pense. Peut-être qu’elle vous répondra qu’il est hors de question que vous sacrifiez votre passion et que vous trouverez une solution.

Si vous avez besoin d’une astuce pour comprendre une situation : interdisez-vous d’analyser le monde sous le prismes des gentils et des méchants (ou des connards et des connasses). Essayez de comprendre plutôt quels sont les intérêts en jeu et les visions du mondes contradictoires. Interdisez-vous même de prononcer le mot “gentil”.

Je ne dis pas qu’il faut devenir un psychopathe malveillant. Je ne dis pas que l’altruisme est une mauvaise chose. Il faut faire des choses pour les autres à condition de les faire gratuitement. Il faut faire des choses pour les autres à condition d’en tirer soi-même un plaisir. Il faut faire les choses pour les autres, à condition de les impliquer dans la décision. Sinon la gentillesse n’est que traîtrise. Vous l’avez compris, je désapprouve le fait de séparer le monde en “gentillesse” et “méchanceté”, “gentils” et “méchants”. Mais si c’est encore votre cas, je vous invite à vous poser une seule question, volontairement dans votre langage : “est-ce que mentir c’est vraiment gentil ?”.

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Annexes

Vous connaissez la chanson : je n’essaie jamais d’écrire quelque chose d’original. Tout ce que j’écris est une combinaison d’autres écrits. Je vous partage donc les sources qui m’ont le plus influencé sur cet article.

La Bible — Dieu

Une fois n’est pas coutume il y avait une citation de la Bible. Et, encore plus étonnant, extraite du “chapitre” qui me terrifiait quand j’étais enfant.

The Top Five Regrets of the Dying: A Life Transformed by the Dearly Departing — Bronnie Ware

C’est un ouvrage un peu lourd dans l’écriture. Mis à part l’histoire que j’ai extraite, lire le résumé suffit amplement mais ça n’enlève rien à la claque de découvrir quels sont les 5 plus grands regrets sur un lit de mort :

1. Je regrette de ne pas avoir eu le courage de vivre une vie qui correspondait à qui je suis, plutôt que la vie que les autres attendaient de moi
2. Je regrette d’avoir travaillé si durement
3. Je regrette de ne pas avoir eu le courage d’exprimer mes sentiments
4. Je regrette de n’avoir pas vu mes amis plus souvent
5. Je regrette de ne m’être pas autorisé à ressentir du bonheur

Lettres à Lucilius — Sénèque

J’ai découvert le stoïcisme sur le tard. J’ai pris ce livre (qu’on peut trouver gratuitement au demeurant) avec beaucoup de scepticisme. Et j’ai fini conquis. Au-delà de sagesse, c’est une piqûre d’humilité : toutes les questions soulevées ont l’air affreusement modernes. Alors que certains essaient de nous faire croire que la quête d’épanouissement est une histoire de génération Y ou Z, cette question est abordée en long et en large, 2000 ans avant qu’on ait l’affreuse idée de désigner des cohortes d’humains par une lettre de l’alphabet.

Ma peau mérite toutes les douceurs du monde : courtes histoires sage et peu sages pour adultes — La Tchipie

Oui, c’est bien un livre érotique. Mais en fait ce n’est pas vraiment un livre érotique. Je ne saurais pas mieux le résumer que ça.

Pharaons et fantômes — Youssoupha

Personne ne semble d’accord pour savoir si Mandela a vraiment dit “ce qui est fait pour moi mais sans moi est fait contre moi”. Tant pis, je ne connais pas la phrase grâce à Mandela, je la connais grâce à Youssoupha. N’en déplaise à ceux qui ont hurlé “c’est pas Youssoupha, c’est Mandela” la première fois que je l’ai cité.

Feu de bois — Damso

Le texte n’a aucun rapport avec le sujet, mais il saisit bien la torture que l’on peut ressentir quand quelqu’un n’ose pas nous dire la vérité.

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Nicolas Galita
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